Réflexions
sur le numérique de demain
Vers
une sphère sémantique de l'éducation ?
Cet
article fait suite à la causerie
informelle de Pierre Lévy
qui réunissait le 15 février 2014 les personnes qui depuis longtemps, suivent
le philosophe précurseur de l'intelligence collective et du virtuel,
qu’il enseignait dans les années 90 au département Hypermédia de
l'Université Paris 8. Pierre
Lévy est actuellement titulaire de la chaire de recherche du Canada
en Intelligence collective à l’Université d’Ottawa et membre de
la société royale du Canada. Lors de cette rencontre il a
présenté sa vision de l'Internet de demain et l'avancée de ses
recherches. Le même jour, France culture a retransmis une émission
radio dans laquelle Pierre Lévy a été interrogé sur sa nouvelle vision d'Internet de demain.
Pierre
Lévy, aussi chaleureux et inspiré que dans ses livres, a partagé
sa vision sur le futur du numérique. Suite à cette causerie
amicale et en caisse de résonance, j'ai souhaité prolonger ce dialogue. Mon article tente de dégager les points qui m'ont paru importants et que j'ai relevés durant son exposé. J'y apporte des
commentaires en résonance et dans la dernière partie, je vous livre quelques réflexions pour une sphère sémantique dans le domaine de
l'éducation.
1.
L'Odysée du Web
Pierre
Lévy a présenté les changements apportés par l'arrivée
d'Internet. Au début des années 1990, la création des standards du
Web au CERN
à Genève (avec Tim
Berners-Lee en 1992) et les débuts de la démocratisation des
réseaux numériques rendent selon lui la possibilité d’avènement
d’une nouvelle société plus communicante.
En résonance...
A
ce propos, on ne peut oublier cet événement : Le 2 septembre
1969 le professeur Len Kleinrock de l’UCLA (University of
California, Los Angeles) et son équipe, avec deux étudiants,
Stephen Crocker et Vinton Cerf, parvenaient à échanger quelques
données entre deux gros ordinateurs reliés par un câble de 4,5
mètres. Ce premier essai est généralement considéré comme
l’événement fondateur d’Arpanet, réseau à l’origine de
l’Internet quelques années plus tard.
Internet,
ne s'est pas construit en un jour et au
fil de l'histoire, l'homme a démontré sa quête pour la
construction des connaissances.
Déjà
Jan Amos Komenský (dit Comenius) avait écrit La
Grande didactique ou l’art universel de tout enseigner à tous
(1627-1632) à travers des images. Un défi difficile à mettre en
place pour une société des savoirs de l’époque limités aux
livres. Dans cette quête vers la construction des savoirs
accessibles à tout le monde, il est important de nous intéresser à
Paul Otlet qui pour William Boyd Rayward et de nombreux chercheurs,
en Europe et aux États-Unis, le reconnaissent comme l’un des
précurseurs conceptuels d’Internet. Paul Otlet auteur du Traité
de documentation
(1935) avait imaginé le "Mundaneum"
comme centre de la connaissance à son époque. Otlet
avait imaginé le Mundaneum qui devait être le centre mondial de la
connaissance. William Boyd Rayward chercheur et professeur, intéressé
par son projet a fait des recherches sur son œuvre et a
réalisé un film accessible en ligne. On y voit des milliers de
kilomètres de fiches, des boîtes, des schémas de codage pour
traiter l’information. Si nous nous référons à ce film en
archive libre, nous pouvons voir la collection des fiches « du
monde » d’Otlet qui voulait classer le monde.
|
Le
mundaneum de la connaissance. 1934 (Musée) |
On
ne peut oublier l'oeuvre de Paul Otlet, son travail de visionnaire
d’Otlet induit de nouveaux concepts qui sont toujours d’actualités:
les technologies de l’information, les techniques de recherche
d’information et les stratégies de recherche, l’émergence du
sens à l’aide de tableaux et de cartographies pour représenter
les aspects historiques, scientifiques et les grands thèmes. Otlet
aurait ainsi mis à jour « les éléments invariants qui ont
affecté la mise en mémoire de l’information dans les systèmes
pour en gérer les accès »
Le
numérique a apporté des changements fondamentaux : une
rupture, un remodelage du paysage éditorial où chaque personne peut
façonner son univers informationnel. Néanmoins, l’utilisateur
doit apprendre à interagir et son statut change. Le statut du texte
écrit change en prenant une forme différente, avec une possibilité
d’y ajouter des images et des sons à volonté, des liens
hypertextes. La navigation devient plus plastique. Avec l’arrivée
d’Internet, nous avons des fonctionnalités qui se rajoutent
apportant des caractéristiques qui n’existaient pas avant. Les
sciences de l’information et de la communication sont plus que
jamais concernées par la mutation fondamentale qu’entraîne la
mise en réseau des systèmes d’information et des mémoires
numériques. Les TIC, technologies de l’information et de la
communication, par leur puissance de traitement, par les moyens de
communication, à un accès accru à l’information confrontent
l’individu à une mémoire immense.
Durant son exposé, Pierre Levy note l'apport des
systèmes l'adressage et la manipulation des données par le biais
des web robots et des algorithmes. Il cite l'exemple de la campagne
de Barack Obama qui a engagé des informaticiens qui ont analysé
l'ensemble des électeurs susceptibles de changer d'avis. Pour Pierre Lévy, il faut aller plus loin. Il nous faut avoir des modèles de
l’intelligence humaine sans se limiter à la simple statistique
des données. Notre
société de la connaissance, avec ces nouveaux paradigmes liés à
l’usage du social-web nous incite à trouver les organisations d’un
travail collectif autour d’un projet pour aboutir à la création
et à la mise en oeuvre d’une véritable intelligence collective
dans la perspective d’une société apprenante. L’organisation du travail qui permet de créer des
connaissances collectives, de les mutualiser, ou les capitaliser pour
mieux penser et agir doit être recherchée.
2. Eloges
pour une intelligence collective réflexive
En résonance ...
Beaucoup d'auteurs ont écrit à propos d'Internet
Serge
Proulx, dans l’ouvrage Odyssée Internet, enjeux sociaux
nous apporte sa vision d'Internet. Pour lui « Internet promeut les
valeurs positives de la pensée-réseaux de la vie communautaire,
comme l’entraide, l’amitié, la coopération, l’échange, le
don. » (Lajoie et al., 2002).
Michel
Serres insiste sur les innovations induites par l'ordinateur en
évoquant la Petite Poucette, qui avec sa tablette, son ordinateur,
Elle tient en main tous les lieux du monde, elle tient en main la
totalité des informations. Trois millards 750 millions de Petites
Poucettes peuvent dire «maintenant, tenant en main le monde ».
Avec Internet, nous habitons dans un nouvel espace : je n'ai
plus que des « proches » et il n'y a plus de
« lointain ». Nous avons déménagé, nous avons changé
de temps et nous avons changé d'espace. Nous sommes dans un espace
de distribution. Petite Poucette n'est plus dans le même monde.
L'espace prévoit des innovations pour toutes les institutions avec
des externalisation de nos fonctions intellectuelles. La
"petite poucette" de
Michel Serres a désormais accès accès au
savoir qui est désormais ouvert. D’une certaine manière, il est
toujours et partout déjà transmis.
Le
web est devenu avant tout social où chaque usager peut devenir
auteur, intervenir sur les sites, commenter. Compte tenu de la
quantité de contenu qui est partagé par les médias sociaux, il est
facile de comprendre comment des pépites d'informations pertinentes
peuvent être perdus dans le tas. Plus de 250 milliards de photos ont
été postées sur Facebook, avec plus de 350 millions de photos
partagées chaque jour.
En termes de contenu vidéo, plus de 100 heures de vidéo sont
téléchargés sur YouTube chaque minute.
Pierre Lévy va plus loin...
Dans
son ouvrage la sphère sémantique, Pierre Lévy met en avant toutes
les nouvelles avancées des médias numériques et du social web
nous offrant des capacités sans précédent de mémoire, un canal
de communication omniprésent, et une puissance de calcul toujours
croissante avec des algorithmes. Nous devons nous demander comment
nous pouvons exploiter ce milieu afin d'augmenter nos propres
processus cognitifs sociaux pour le développement humain. Grâce à
une combinaison d'une connaissance approfondie des sciences humaines
et sociales, et la compréhension des sciences informatiques, Pierre
Lévy propose une construction collaborative d'un hyper-cortex
mondial, coordonné par un métalangage calculable. En reconnaissant
ainsi pleinement la nature symbolique et sociale de la cognition
humaine, nous pourrions bâtir ainsi un nouveau Mundaneum mondial
reposant sur une intelligence collective réflexive. Dans son
prochain ouvrage, Pierre
Lévy nous montrera la place et le rôle l'algorithme au service de
l'intelligence collective.
Pierre
Lévy nous apporte une nouvelle dimension d'Internet qui nous permet
de développer une intelligence réflexive, fractale. "Au niveau
d'une équipe, d'une ville, d'un pays, il devrait être possible
d'avoir une représentation de ces propres processus cognitifs à
partir de toutes les données produites". Pour Pierre Levy, Internet
qui permet d'observer ses propres processus cognitifs et les enjeux
de l'Internet de demain consiste à " augmenter la plupart des
facteurs qui dynamisent le développement humain".
Des
écosystèmes d'idées à décrypter et
cartographier
Pour
Pierre Lévy, il est important de pouvoir développer un modèle
scientifique de l'Intelligence collective. Pour cela, Pierre Levy a
inventé un langage artificiel calculable avec la grammaire IEML qu'il
développe depuis 20 ans. l'IEML
(Information Economy Meta-language) est en quelque sorte un
métalangage algorithmique qui
permet de représenter des concepts comme des ensembles de points
dans un espace sémantique coordonné et le métalangage a vocation à
être utilisé par un protocole internet pour que naisse un espace
sémantique commun sur le Web qui soit plus évolué et plus puissant
que le Web
sémantique actuellement préconisé par le WWW
consortium, mais compatible avec celui-ci.
"Nous
pouvons aujourd’hui connaître immédiatement notre propre position
géographique et accéder automatiquement à la géolocalisation de
n’importe quel objet ainsi qu’à la manière d’y accéder à
pied ou par un quelconque moyen de transport. De la même façon,
nous pourrons dans le futur nous situer dans le monde des idées, y
localiser n’importe quelle personne, objet ou ensemble de données
et explorer ses voisinages sémantiques". Pierre Lévy
La
grammaire IEML est un langage pivot qui se connecte aux langages
naturels. Pierre Lévy nous livre quelques apports possibles d'IEML :
"imaginons qu'au lieu d'avoir des hashtags en langage Twitter mais en
langage IEML. Nous serions capables de faire émerger sur un
sujet, un écosystème d'idées, tout ce que les gens disent à ce
propos, en activant des réseaux sémantiques. Google Glass, un
écosystème d'idée, un aura sémantique. Il pourrait également
être utilisé comme instrument d’observation ou de cartographie
réflexive des activités des réseaux sociaux en ligne".
Pierre
Lévy insiste sur la représentation de l'intelligence collective et précise :
« C’est pourquoi nous devons concevoir une civilisation
mondiale dans laquelle chaque communauté humaine (famille, école,
réseau, équipe de travail, association, entreprise, ville, parti,
nation, etc.) possèdera une représentation interactive de son
intelligence collective : l’écosystème d’idées qu’elle
génère et dont elle s’alimente. Cet écosystème se présentera
comme un hologramme dynamique explorable – en réalité virtuelle
ou augmentée – que l’on pourra décomposer, analyser ou
fusionner à volonté avec ceux d’autres communautés ou d’autres
individus. » « Dans la culture numérique du futur, tout
le monde saura et verra « de ses propres yeux » qu’un groupe
humain vit en symbiose avec l’écosystème d’idées qu’il
nourrit, qui le représente et qui le nourrit en retour ».
Dans son article au titre percuteur et évocateur, Janique Laudouard indique que Pierre Levy invente ainsi le GPS de l'intelligence collective
3. Vers une
sphère sémantique de l'éducation ?
Comme
Pierre Lévy nous l'explique dans son ouvrage, il nous faut développer
une sphère sémantique dans laquelle les écosystèmes d’idées
seront produits et explorés de manière collaborative dans un espace
public – un réseau social – ouvert et universel. Les navigateurs
de la Sphère sémantique s’associeront en une multitude de jeux
sémantiques dont chacun obéira à des règles particulières de
catégorisation et d’évaluation des données. Le nouvel espace
public abritera notamment des jeux d’apprentissage conçus pour
augmenter simultanément la gestion personnelle et la gestion sociale
des connaissances. Quant aux idées de la Sphère sémantique, ce
seront tout simplement les « status updates » de ses utilisateurs.
Mais alors que dans les médias sociaux contemporains on se sert de
hashtags en langues naturelles, dans la Sphère sémantique on
utilisera IEML pour catégoriser les données. Cette rencontre avec
Pierre Lévy a été déterminante pour moi et je n'ai pas pu
m'empêcher de me poser la question fondamentale. Mais qu'en
est-il pour l'éducation ?
La sphère
sémantique : au cœur de l'individuel et du collectif
Cette
sphère sémantique pour qu'elle puisse prendre forme et être en
permanente évolution dans le domaine de l'éducation, doit pouvoir
établir un maillage prenant prendre en compte l'individuel et le
collectif. A la croisée des connexions où l'individuel et le
collectif peuvent se rencontrer, interagir, l'intelligence
collective pourra y trouver un terreau favorable comme je le montre
dans ma thèse de doctorat à m'appuyant sur la gestion des
connaissances en ligne via les pratiques du socialbookmarking qui est
une porte ouverte vers l'intelligence collective. Le
dispositif de socialbookmarking qui vise à archiver, mémoriser,
partager des signets en groupes ou en communautés, peut être
considéré comme un « dispositif processuel de la mémoire »
fonctionnant sur le travail coopératif des usagers partageant leurs
signets et développant une mémoire collective. Mais ces bases de
signets ne sont pas de simples magasins ou de simples puits à
ressources et si on se réfère à l’entretien mené par Federico
Caselegno avec Pierre Lévy (Caselegno, 2005), l’enregistrement des
données n’a pas de valeur en soi. Pour Pierre Lévy interrogé, ce
qui vaut, c’est « l’intelligence collective qui s’en nourrit
», partout distribuée, sans cesse valorisée, coordonnée en temps
réel, qui aboutit à une mobilisation effective des compétences. Le
socialbookmarling implique une mobilisation des ressources
personnelles des utilisateurs qui peuvent développer des attitudes
nouvelles d’autonomie dans le travail et démontrer leur capacité
à apprendre par eux-mêmes. En empruntant l’expression de Philippe
Carré, on peut dire qu’en pratiquant le socialbookmarking, les
enseignants et les acteurs de l’éducation sont appelés à devenir
des « travailleurs du savoir ». Le socialbookmarking favorise la
mise en place de l’apprenance qui ne s’exerce pas uniquement dans
le cadre des formations institutionnelles mais à travers une «
écologie de l’apprenance », toute entière tournée vers la
démultiplication des occasions d’apprendre, en dehors du temps de
travail (Carré, 2005).
Nous avons vu que ce que les pratiques du socialbookmarking représentent un lieu potentiel de formation pour les
praticiens du socialbookmarking. Nous avons vu qu’avec l’outil
Diigo, nous pouvons nous retrouver à l’intérieur d’un
méta-réseau, les partenaires communautaires étant reliés comme
« amis », appelés à se visiter et à se
questionner à travers des environnements interconnectés de travail
via les forums et les commentaires autour des usages des ressources.
Nous avons montré toute l'importance de pouvoir établir la
passerelle entre l'individuel et le collectif , la puissance de
l'apprentissage informel dans une perspective de réseau social. Des
méthodes telles que l'analyse des réseaux sociaux peuvent
permettre aux chercheurs établir des relations informelles entre les
participants ; améliorer notre compréhension de l'impact des
activités sur le perfectionnement professionnel. Comme le souligne Steve Wheeler, le futur de l'éducation sera très
social et personnel à la fois. Le socialbookmarking qui peut être considéré comme un nouvel outil
pour créer le Mundanéum de la connaissance en est une illustration. Dans ma
thèse, je montrer l'importance du développement de la gestion des
connaissances personnelles (Personal knowledge management ou PKM) qui
est l'ensemble des procédés qu'un individu met en oeuvre pour
rassembler, rechercher, classifier et partager la connaissance au
quotidien1,
ainsi que la manière dont ces processus aident son travail. Ce
concept est associé à l'idée selon laquelle le travailleur de la
connaissance doit être acteur de son propre apprentissage Enfin il
s'agit d'une approche « bottom-up » de la gestion des
connaissances, qui s'oppose à une pratique traditionnelle plus
« top-down ».
Le socialbookmarking s'inscrit dans ces pratiques de
formation informelle. On apprend aussi sans vraiment sans le vouloir,
grâce à l'accès à une ressource (un document, une ou des
personnes, un texte, un film...) et à la réflexion ou l'action
qu'elle nourrira. La navigation sur Internet, à des fins privées ou
professionnelles, prend une place importante dans nos vies, et y
insérer le socialbookmarking de manière habituelle contribue à
l'accroissement de la durée de vie des ressources rencontrées.
Quand la démarche s'inscrit dans un cadre collectif, l'effet est
démultiplié. D'abord, parce que le quantité de ressources
pertinentes (évaluées par les utilisateurs) est beaucoup plus
importante; ensuite, parce que le collectif stimule l'utilisation,
l'envie de continuer à apprendre, comme nous l'avons vu pour les
enseignants. Et il est intéressant de constater que les compétences
demandées (trier, filtrer, rendre explicite, etc.) sont les mêmes
que celles qui permettent de construire son espace de « Personnal
Knowledge Management », ou espace de gestion personnelle
des connaissances. Dans ma thèse, je montre que la définition du
PKM peut s'inscrire dans les pratiques du socialbookmarking.
Thèse Michèle Drechsler PKM et
socialbookmarking, 2009
La
sphère sémantique intégrée à tous les niveaux du système
éducatif
Avec
le numérique, la gestion des connaissances est au cœur du système
éducatif avec une accessibilité aux ressources éducatives
facilitant ainsi la personnalisation des parcours, la création d'espace
personnel d'apprentissage des enseignants et des élèves. Des écosystèmes de
partages de co-construction de savoirs en ligne peuvent être
développés au service de la professionnalisation des enseignants.
Le rapport de l'OCDE révèle que les pays de l'OCDE
prennent de plus en plus de mesures novatrices liées à la recherche
afin d’améliorer la base de connaissances dans le domaine de
l'éducation. D’importants changements dans le domaine des
connaissances et de la culture s’imposent encore pour faire évoluer
les pratiques et créer un processus permanent d'amélioration de la
base de savoirs pour l'ensemble du système éducatif. Comme le note
l'OCDE, Les TIC offrent un potentiel
puissant de transformation des systèmes d’éducation, mais elles
restent sous-utilisées dans le cadre scolaire, en partie parce que
dans les domaines de l’administration scolaire et de
l’enseignement, les systèmes demeurent réticents au changement.Le GPS de l'OCDE nous offre un accès quasi illimité aux données de
l’OCDE en matière d’éducation.
Avec la grammaire IEML, le défi
sera de pouvoir organiser au mieux cette gestion de la connaissance
facilitant le partage des savoirs d'expériences, donnant une
meilleure lisibilité des connaissances pour mieux agir, prendre des
décisions dans le système éducatif. Les organisations devront créer les conditions pour
favoriser les espaces de partage, de mutualisation dans cette sphère
sémantique de l'éducation facilitant les « représentations »
et l'accès aux informations liées au métier, à la didactique professionnelle, aux pratiques pédagogiques, à la construction du savoir.
Pour une nouvelle architecture de l'information ?
Au cœur de la gestion des connaissances du système éducatif,
l’architecture de l’information doit pouvoir prendre en compte
la globalité des processus de production, recherche et diffusion des
connaissances du système éducatif. L'IEML avec sa grammaire ne
pourrait-elle pas nous aider à définir une meta-architecture
permettant de façonner la manière d’apprendre, d’enseigner, de
communiquer, pour mieux agir, inscrivant les sciences de l'éducation
dans l'inteconnexion avec les sciences de l'activité ?
Les institutions devraient, progressivement intégrer la mise en
place d'écosystèmes pour faciliter les processus de production,
recherche, diffusion et représentation des connaissances du système éducatif via
les réseaux sociaux dans le but de pouvoir mieux agir, créer, organiser.
Le pilotage vertical est sans doute devenu obsolète pour ce projet comme nous l'avons vu avec le socialbookmarking qui atténue la frontière entre les
« amateurs » et les « experts ». Dans un
groupe d'intérêt, chacun est légitime pour apporter des
ressources. Ces dernières sont acceptées tant qu'elles répondent
aux besoins. Cela relativise largement la position d'autorité que
s'arrogent les experts. Comme nous l'avons vu, le socialbookmarking
est une pratique très personnalisable : votre bibliothèque de liens
ne ressemble pas à la mienne, même si nous appartenons au même
groupe. Le rôle de l'institution ne serait-il pas de proposer un "cadrage minimal", de créer des conditions pour pouvoir structurer et mieux saisir les enjeux de cette sphère sémantique qui doit pouvoir faciliter la personnalisation des apprentissages ? Cette personnalisation est très importante de nos jours, car
nous voulons avoir la maîtrise de nos parcours de formation. Et du
coup, l'apprentissage étant personnalisé, basé sur des ressources
que l'apprenant (partant du principe que nous sommes tous apprenants,
dans cette configuration) a lui-même choisies, devient efficace.
Pour développer cette sphère sémantique, l'institution doit
pouvoir mettre en place une organisation en réseau avec des enseignants mis en confiance ayant une culture du partage comme nous le montre Jarche dans le schéma ci-dessus pour les entreprises. Ne voit-on pas là une porte d'entrée dans cette sphère sémantique, porteuse de sens pour le développement professionnel des enseignants ? Nous avons vu que les pratiques autour du socialbookmarking peuvent nous y aider. En effet, tels les Robinsons qui
sont généralement des héros civilisateurs qui investissent l'île,
la colonisent, la cartographient, et nomment chaque endroit en étant
des pionniers organisateurs, les praticiens du socialbookmarking
aménagent et apprivoisent l'île du savoir, investie par
chacun et pouvant apporter des fruits pour tous. Un exemple de défis pour construire une
sphère sémantique de l'éducation ?
Liens
sur les recherches et travaux de Pierre Lévy
http://pierrelevyblog.com/2013/03/24/the-semantic-sphere-vol-1/
Le
progrès c'est nous :
https://www.dailymotion.com/video/x178zbi_le-progres-c-est-nous-pierre-levy_news#from=embediframe
De
nouvelles compétences cognitives
http://pierrelevyblog.files.wordpress.com/2013/05/competences-cognitives-pierre-levy.pdf
Emission
France-Culture avec Pierre Lévy – 15 Février 2014
Autres liens
Drechsler, M. (2009). Thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication. Pratiques du socialbookmarking pour l’Éducation. Affordances sémantiques, socio-cognitives et formatives.
http://www.theses.fr/2009METZ018L